L’enjeu de la cybersécurité spatiale pour les agences africaines

Le développement des agences spatiales africaines régionales et la création d’un organisme pour le continent introduit de nouveaux enjeux de gouvernance dans l’utilisation du spatial. 

Ils concernent principalement la gestion des territoires avec les conséquences induites par l’usage des données spatiales. Pour assurer un appui à la mise en valeur des territoires, la connectivité est un atout pour chaque acteur désirant échanger des biens et des services matériels et immatériels. 
Ce faisant, les satellites de télécommunications comme les satellites d’observation constituent des facteurs de développement des activités au sol, en offrant à ceux qui exploitent leurs données, les moyens d’optimiser ou d’améliorer un fonctionnement. Or, des pays africains ont commencé depuis le début des années 2000 à développer des partenariats et des coopérations pour lancer des satellites en orbite basse. Tout en s’appuyant sur des satellites déjà en orbite, d’autres moyens plus autonomes qualifiés de « Space object Things » permettent d’intégrer les réseaux spatiaux aux usages terrestres. 

L’une des conditions permettant d’assurer l’optimisation et l’amélioration du fonctionnement des territoires se trouve dans la prise en compte des enjeux de cyber-sécurité appliqués au domaine spatial. Cette problématique, n’étant pas spécifique au continent africain, n’en est pas moins un enjeu de gouvernance au regard de ses caractéristiques : gestion des distances, gestion des infrastructures, gestion du climat, gestion des structures sociales en milieu rural. Pour l’ensemble de ces sujets, il s’agit d’assurer un support disponible et performant en évitant toute dégradation volontaire ou involontaire. Le socle de ce support se base sur des briques de réseaux pour lesquelles les agences spatiales africaines jouent un rôle de « Frame Relay » pour le développement d'infrastructures au sol et l’utilisation d’applications mobiles sécurisées. Enfin, l’absence de lanceurs et de sites de lancement constitue également un enjeu de cyber-sécurité pour les agences africaines puisqu’elles dépendent d’un risque d’assurance supplémentaire dont elles n’ont pas la maîtrise.

Le spatial offre grâce aux techniques utilisées par les satellites d’observation les moyens d’optimiser la gestion des territoires urbains, des aires agricoles, des zones naturelles. S’ils possèdent leurs propres spécificités, les interactions entre ces trois zones constituent les bases d’un système complexe dans lequel les activités humaines créent des dynamiques d’échanges. 

Celles-ci ont des effets à l’intérieur de chaque territoire et entre les territoires eux-mêmes. Le degré d’optimisation dépend autant des infrastructures que de la capacité à identifier des flux d’échanges préférentiels. Les moyens d’atteindre cette performance s’appuient sur des outils de télécommunications et d’observation. Notons la présence de Afrique Telecom, un opérateur spécialisé dans la distribution du haut débit en Afrique. Il s’appuie sur des systèmes de télécommunications par satellite de 128 kbits/s à 10 mbits/s.

D’autres moyens permettent de visualiser, de comparer, de détecter et de mesurer un flux de données. Il s’agit des capteurs intégrés à l’architecture du satellite qui fournissent au segment sol des données d’entrée. Les capteurs spatiaux augmentent cette faculté d’analyse dans la mesure où le niveau d’observation permet de descendre dans les couches basses de la matière.

De plus, les élongations offertes par les systèmes de télécommunications optimisent les communications numériques sur des vastes territoires en combinant les infrastructures au sol. Une offre VSAT garantit, à travers une installation sur un territoire, un réseau informatique, un réseau téléphonique via un répartiteur et un réseau de FAX. La sécurisation de ces moyens d’observation et de télécommunication garantit le niveau de performance des territoires en comprenant davantage les interactions de systèmes complexes au sol. En effet, un service de télécommunication et d’observation est destiné à des fournisseurs d’accès et des utilisateurs finaux. The Network Computer System au Ghana fut en 1995, le premier fournisseur d’accès à offrir une connectivité à Internet en Afrique de l’Ouest via une ligne spécialisée et qui fournit ses services à une station passerelle.

Dès lors, dans un contexte où les agences spatiales utilisent et déploient des moyens en orbite, il est légitime d’introduire dans la phase de développement des moyens de contrôle, de suivi et de surveillance des réseaux spatiaux utilisés pour la gestion au sol. Cette posture positionne les agences spatiales africaines comme des acteurs du développement de leurs territoires. Des partenariats sont ainsi créées pour développer des solutions telles que des nano-satellites d’observation initiés entre l’agence spatiale nationale du Nigéria et des sociétés privées.

En étant support du développement de satellites d’observation et de télécommunication, elles offrent à leurs populations les moyens d’agir dans leurs vies quotidienne. En effet, en combinant télécommunication et observation, le niveau potentiel de connectivité s'élevant, des solutions innovantes s’invitent à la résolution de problèmes locaux. L’utilisation de l’infrarouge des capteurs des satellites sont exploitées pour superviser les ressources naturelles. Et, avec eux, un management du risque qui permet de répondre aux enjeux spécifiques des territoires africains : gestion du risque agricole, gestion de l’eau, gestion des forêts, gestion de l’urbanisme, gestion des zones rurales, gestion de la mobilité, gestion maritime, gestion des humidités.

Le satellite SIMBA permet d’étudier le comportement des animaux sur un territoire. Ce management prend également en compte le besoin de gérer la conformité des futurs programmes spatiaux africains gérés par les agences régionales et ceux administrés par l’agence spatiale africaine au Caire. 
 

La cyber-sécurité spatiale constitue un enjeu au besoin de développement des territoires africains. Le support apporté par le spatial couvre autant la capacité à échanger des données qu’à les exploiter dans un temps court.
 

Les agences africaines, par le support qu’elles accordent aux projets, et la protection qu’elle consacre aux infrastructures de leurs moyens spatiaux conditionnent le besoin en cyber-sécurité. De plus, l’utilisation du smartphone est l'une des spécificités des usages africains dans la consommation de ressources de l’Internet. Ce réseau fédérateur concentre l’ensemble des transmissions sur la base de la connectivité TCP/IP. Dès lors, l’usage d’applications constitue un moyen de connexions avec d’autres acteurs des territoires africains. Considérant que les réseaux satellitaires sont fournisseurs de connexions, la « RAMS » des applications représente également un enjeu pour les agences gouvernementales africaines.

Une application capable d’améliorer les prédictions de temps grâce à des satellites de navigation se pose comme un outil pour l’agriculture. Si une agence spatiale comme l’ESA a développé une application en collaboration avec l’Université de Zurich pour améliorer ce type de prédiction, les agences africaines disposent du potentiel pour réaliser ce type de projet. A l’instar de cet exemple, les smartphones disponibles sont des sources de données pour anticiper le changement de temps. Une chaîne sécurisée du signal est, de facto, un canal nécessaire pour des programmes spatiaux en appui du segment sol. L’agence spatiale du Kenya est chargée de la promotion, de la coordination, de la régulation des activités liées au spatial. A cet effet, cette agence soutient des projets dont celui d’une collecte de données sol. Les infrastructures au sol sont également concernées. 

Le cas de l’observatoire d’Entoto démontre comment les technologies spatiales constituent un enjeu de gouvernance de la cybersécurité du point de vue de la gouvernance. Le projet touche au fonctionnement d’un système de surveillance et de suivi intégré à une infrastructure existante. Le télescope a fait l’objet d’une modification de son architecture par l’ajout de composants software et hardware au système optique.

Le but opérationnel est d’assurer l’utilisation du système à des fins de suivi et de surveillance. Pour comprendre la dimension cybersécurité de cette infrastructure, il s’agit de décrire l’architecture et les fonctions associées. 

Le télescope optique est relié à une unité de commande et de contrôle basée sur un système de navigation. Cette même unité est reliée à plusieurs interfaces sur la base d’une relation client-serveur vers des utilisateurs, des entités externes et un data-center pour le lien de secours. Le dôme, le télescope, et la station météo s’appuie sur cette relation client-serveur à travers une interface logicielle. La cybersécurité doit assurer la continuité d’activité du système pour remplir les fonctions des segments suivants : interface utilisateur pour la surveillance et le suivi, le système de management des données, le télescope, le module de contrôle et de commande. Si ces services séparés sont interdépendants, ils partagent la même architecture pour les senseurs optiques, les éléments actifs du réseau et le processus logiciel. Dans le cas où ce processus n’est plus disponible, l’agence spatiale du Kenya perd la capacité de détecter des objets pour assurer la sûreté des opérations des satellites en orbite. 
Et, avec eux, la perte capacitaire de la fauchée de surface permettant d’analyser les données au sol pour résoudre des problèmes identifiés. Et d'autant plus que le lancement des propres satellites africains implique, également, de pouvoir les superviser.

Copie de la STRATÉGIE SPATIALE AFRICAINE

METMATI Djamel
Ingénieur de cybersécurité spatiale
Cybersecurity Consulting Operation - Thales

METMATI Djamel a travaillé au sein de l'agence spatiale Européenne. Il a notamment créé le concept du "Computer In Space". Lauréat du trophée k2 Cybersécurité 2018. Membre de l'association AEGES, auteur de L'art de la guerre en réseau, ainsi que d'articles pour la Chaire Cyberdéfense Saint-Cyr et la Revue de Défense et de sécurité internationale.