Infrastructure publique numérique dans les zones rurales au Bénin : quand la connectivité instable devient un frein à l’accès optimal des services en ligne

La digitalisation des services publics marque une avancée majeure dans la modernisation de l’administration au Bénin. Toutefois, dans les zones rurales comme Djougou, de nombreux citoyens peinent à faire efficacement leurs démarches administratives en ligne. Pour cause, la connectivité instable dans ces zones.

Malgré les progrès du Bénin pour implanter des infrastructures publiques numériques dans les zones rurales, un défi entrave l’accès inclusif à ces services. Il s’agit de la mauvaise connectivité dans les zones rurales.  Selon un Rapport de Include Plateforme, plus de 50% de la population béninoise vit en milieux ruraux avec un accès limité à internet et à l’électricité. Une chose qui se révèle comme étant un frein à l’accès optimal de ces services publics digitalisés. 

Djougou
                                                                La ville de Djougou

À Djougou dans le département de la Donga au nord du pays, principalement dans les quartiers tels que Sassirou ou Taifa plusieurs habitants peinent encore à mener efficacement des démarches administratives en ligne. Cette situation est due à une mauvaise connectivité dans la région et la frustration se fait sentir chez les uns et les autres. Le mardi 17 décembre 2024, Bony Boukarissakibou,  résidant à Djougou depuis plusieurs années, essai de lancer depuis plusieurs heures une demande de son CIP en ligne mais en vain. Pour lui, il s’agit d’une belle innovation qui facilite la vie à la population mais la connectivité demeure un défi. « Nous n’avons plus beaucoup de difficulté par rapport aux documents que nous tirons. Mais au niveau de la plateforme d’e-service, souvent il n'y a pas connexion, ça flotte beaucoup. Surtout à la mairie, ils vous diront qu’il n’y a pas la connexion, vous revenez le lendemain, même scénario », confie-t-il visiblement embêter par cette situation. Un avis similaire que partage d’ailleurs Saka Pierre, Instituteur de profession, résidant dans la région. Il avoue que la difficulté majeure reste la connexion.  « Quand je veux tirer une pièce en ligne, c'est la connexion qui me fait défaut. Je suis obligé d’attendre ou d’aller directement à la mairie où eux-mêmes rencontre des difficultés de connexion et cela peut prendre plusieurs jours » fait-il savoir. Pour sa part, dame Irène une autre résidente explique qu’elle a récemment lancé une pièce administrative « ça m’a pris trois jours. J'ai dû me déplacer pour aller à Parakou pour avoir gain de cause ».

Cette disparité en termes de connectivité dans les zones rurales et urbaines, reflète un défi majeur pour l’adoption optimale des services en ligne. Et bien au-delà de la disponibilité, les services publics digitalisés doivent pouvoir être accessibles et utilisables par les individus de toutes les catégories sociales. Selon Hospice Michoagan Spécialiste en test de sécurité informatique à Ecobank Group, les opérateurs de télécommunications ne déploient pas suffisamment leurs infrastructures dans ces zones, parce que premièrement, ces zones n'ont pas forcément une grosse concentration sociale. Elles sont faiblement alimentées, je veux parler, d'électricité. Par ailleurs, la solution réside dans une approche intégrée comme il l souligne d’ailleurs… « Je pense que ça revient d'abord au gouvernement de renforcer l'infrastructure énergétique dans ces zones pour faciliter l'implémentation des antennes réseau des opérateurs GSM, encourager aussi les opérateurs aller dans ces zones » affirme-t-il. L’accès à internet étant un facteur primordial pour l’accès et l’utilisation des services publics digitalisés, le gouvernement entend poursuivre ses efforts d’investissements dans les infrastructures numériques ainsi que les réformes incitatives d’investissements par les opérateurs des télécommunications. « Nous travaillons à accélérer la digitalisation des processus internes de l’État afin de garantir une administration connectée et efficace », précise Aurélie Adam Soulé Zoumarou dans un entretien accordé à l’Agence Ecofin. Ces efforts visent à rendre les e-services accessibles à toutes les régions, y compris les collectivités locales. 

Le Bénin place au cœur de son développement depuis plusieurs années la transformation numérique, en insérant la technologie pour fluidifier l’accès aux services publics. Ainsi, avec l’usage des outils qu’offrent les TIC, l’administration publique béninoise s’est modernisée avec la digitalisation des services publics. Parmi les avancées majeures figure le portail national des e-services. Son objectif est de faciliter l’accès des citoyens aux services publics et améliorer la qualité de la gouvernance. Grâce à ce portail, selon Aurélie Adam Soulé Zoumarou, Ministre du Numérique et de la Digitalisation, plus de 210 e-services sont disponibles sur 29 plateformes, dont 104 regroupés sur le portail national des services publics. Plus de 2500 km de fibre optique ont été déployés, permettant d’améliorer l’accès au haut et très haut débit dans toutes les communes. Le taux de pénétration d’Internet est parti de 20 % en 2015 à plus de 70 % en 2023. Ceci améliorant les disparités entre les zones urbaines et rurales.

Dans ses efforts d’investissements pour favoriser l’accès des populations béninoises à internet, le gouvernement doit envisager des politiques et stratégies pour un accès plus favorables aux populations des milieux ruraux.

NB: Cet article a été rédigé dans le cadre de la Bourse de journalisme sur les IPN organisée par la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest et Co-Develop.

Christelle HOUETO 
Journaliste digital